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Cette saison

Jot Fau

Résidence de création | Mars à mai 2025  
Sander Muylaert

Née en 1987, Jot Fau est diplômée d’un Master à l’École des Beaux-Arts de Marseille en 2012, elle vit et travaille à Bruxelles.  Elle est artiste plasticienne. Elle pratique la sculpture, l’objet, l’installation et la photographie. Elle a également une pratique sculpturale du vêtement. Elle croise et interprète régulièrement dans son travail une ou plusieurs de ces disciplines. Son travail aborde des questions d’identité, de faire et de devenir, d’expéditions et de recherches, de départs sans principe d’arrivées. 

Jot Fau recherche des stratégies d’adaptation et de fluidité. Déjà profondément ancrées dans une forme d’auto-guérison et d’auto-protection, elle considère l’identité comme une véritable matière aux multiples possibilités transformatrices. Sa recherche au 3 bis f se construira autour de l’objet magique ; l’objet qui protège, qui soutient et qui transforme. Cette recherche nourrira son travail, déjà profondément ancré dans une forme d’auto-guérison et d’auto-protection. Soucieuse de la mémoire, Jot cherche à opérer des points de rencontres entre passé et présent, intime et commun, réel et fiction, en valorisant l’usure des matériaux, leurs vécus et leurs défauts. 


CONVERSATION

  • F comme ? 

La Force

La Fluidité

Le Foyer, très important

Les Fragments

Et la Fouille

Les 5 font partie intégrante de ma pratique, dans tout ce que je fais.


  • Quelle est la genèse du projet ?

J’ai été invitée par Marie De Gaulejac, nouvelle directrice artistique des Arts visuels du 3 bis f. Je n’ai pas encore de projet. Je ne sais pas ce que je vais faire. La genèse du projet est encore très lointaine pour moi car j’arrive au 3 bis f en mars 2025.

 

  • Pourquoi le 3 bis f pour ce projet ?

Dans mon travail, j’explore l’émotion de la mémoire, de l’histoire vécue et de l’histoire racontée pour faire un dialogue entre passé et présent, entre l’intime et le commun, entre le réel et la fiction. J’aime travailler dans des lieux imprégnés d’histoire. J’aime utiliser de la matière usée, vieille et donc chargée aussi. Les concepts d’identité, de transformation et de soin sont des socles assez centraux dans ma pratique, déjà fortement ancrée dans une forme d’auto-guérison et d’autoprotection. Et le 3 bis f étant cet environnement fermé, qui est à la fois un lieu de vie contemporain et un lieu de soin, mais fortement chargé de ces histoires marquantes de son passé, va grandement nourrir le projet. La manière de me projeter au 3 bis f dans plusieurs mois n’est pas ma manière de fonctionner, j’ai comme une espèce de confiance dans la vie et dans les rencontres qu’il va y avoir avec les gens, les lieux, la matière.

 

  • Comment travailles-tu ?

La première étape de ma démarche est la recherche de la matière, la collecte, la fouille de la matière dont les nouvelles pièces seront constituées. C’est une collecte à la fois de matière concrète, d’images (matière iconographique) et de mots (matière littéraire). Cette recherche-là va continuer jusqu’au bout du projet, et constamment nourrir le projet.

Je travaille toujours sur plusieurs pièces en même temps, ça me permet de laisser certaines pièces en jachère, et de tourner comme ça continuellement, de donner le temps nécessaire aux pièces de se complexifier, strate par strate, jour après jour. Le temps est un outil assez primordial dans ma recherche. C’est grâce au temps que les pièces vont devenir cohérentes individuellement, mais aussi comme un ensemble.

Ma méthode de travail est assez personnelle et chronophage. Elle nécessite très peu d’outils. C’est une méthode éloignée des techniques classiques, productives, justes et bonnes. J’embrasse pour la fabrication des choses une certaine pauvreté, plus ou moins radicale selon le projet sur lequel je travaille.

J’ai peu de frais de production. J’ai dû apprendre car j’avais une pratique très pauvre, n’ayant pas d’argent. Maintenant je réfléchis, j’ai aujourd’hui un peu plus de moyens, car j’étais dans une démarche de sobriété. Avant je travaillais avec des outils déglingués, qui faisaient mal au corps, maintenant je vais acheter du bon fil, de bons ciseaux, une bonne chaise, investir dans un bureau, investir dans des outils qui vont rendre plus agréable le quotidien. Je vais aussi pouvoir payer des personnes, et mieux me rémunérer peut-être. Car c’est une pratique qui coûte très cher en heures de travail. Je suis dans une démarche de rendre durable ma pratique.

 

  • Comment cohabites-tu avec ta folie ?

Mais c’est difficile ! C’est vraiment dur pour moi de répondre à cette question car c’est dur de parler de la folie aujourd’hui. Il y a quelque chose de presque romantique dans cette question alors qu’on est dans une institution qui soigne des gens qui souffrent vraiment. Je suis arrivée à la conclusion, il y a très peu de temps, que je cohabitais avec elle sans même m’en rendre compte, avec naturel. Cela se traduit chez moi par une obsession du travail et par un certain perfectionnisme, qui me suit partout où je vais. On m’a très souvent dit que j’étais perfectionniste, j’ai toujours refusé de le croire parce que dans mon travail et en règle générale, je suis toujours en train de chercher, toujours très touchée et attirée par ce qui n’est pas parfait. J’avais du mal à me dire que j’étais perfectionniste car je n’aime pas ce qui est parfait. Du coup, maintenant, je conçois maintenant que quelque chose peut être à la fois cassé, pauvre, vieux, de travers et à la fois parfait. Et que c’est finalement le chemin pour arriver à une image exacte qui me parait s’approcher de cette idée d’obsession que moi j’aurai. Et que c’est là ma folie, une manière très obsessionnelle de travailler.

 

  • Un livre, un film, un Podcast avec laquelle tu arriveras peut-être en résidence au 3 bis f ? 

Technic and magic, The reconstruction of reality - Federico Campagna

On freedom, Four songs of care and constraint - Maggie Nelson

The more beautiful world our hearts know is possible - Charles Eisenstein

Matter and desire, An erotic ecology - Andreas Weber

et des podcasts à venir…